D’après Julia A. Reuben, professeure d’histoire de l’éducation américaine à la Harvard Graduate School of Education, les professeures et les professeurs d’université auraient intérêt à mieux circonscrire la liberté académique lorsqu’elles ou ils prennent la parole en tant qu’experts. Elle se prononce dans une lettre d’opinion à la suite d’un cas où un professeur de l’Institut Hoover – associé à Stanford – a utilisé sa position pour faire la promotion de stratégies alternatives de lutte au coronavirus (dans la lignée des positions de la Maison-Blanche).
Elle rappelle que les principaux litiges entourant la liberté académique aux États-Unis ont surtout eu à voir avec la prise de parole de professeures et de professeurs dans la sphère publique (contre la guerre du Vietnam, par exemple) en tant que citoyennes et citoyens, alors que liberté académique et liberté d’expression se mélangent. Toutefois, elle estime que peu de réflexions ont eu lieu quant à d’éventuelles limites à la liberté académique dans les sphères de la recherche et de l’enseignement:
“Nous devons élaborer des normes professionnelles qui régissent notre comportement en tant qu’experts – et les conséquences pour les personnes qui violent ces normes. Cela signifie qu’il faut rejeter l’équation entre la liberté académique et la liberté d’expression et, au contraire, formuler des restrictions légitimes à notre comportement en tant que professionnels…” [Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)]
Academic freedom should ensure that faculty members can conduct their research free from restrictions and influences that might limit the questions they ask and distort their findings. But this does not mean that academics are free to say anything they please in professional contexts. Speech in academic spaces is highly regulated. Research cannot be published without rigorous review. Professors insist that students remain roughly on topic when they speak in class. The content of academic speech matters. […]
Now we are experiencing a crisis of misinformation — and our profession has contributed to it. Instead of modeling how standards of evidence and logic can create more trustworthy knowledge, our lack of a coherent professional ethics has fueled the notion that all opinions are equal in the marketplace of ideas...
Elle admet qu’il sera difficile d’établir les frontières entre la prise de parole citoyenne d’universitaires et celle où les professeures et les professeurs se présentent en tant qu’expertes et experts. Avant d’envisager des sanctions – qui, selon elle, devraient être le fait de comités de pairs – elle suggère d’examiner des cas réels et hypothétiques où des universitaires ont utilisé leur statut pour prendre part au débat public “exprimant des points de vue avec certitude lorsqu’ils savent qu’il y a des questions importantes à poser sur leur validité, ou minimiser des informations qui pourraient être préjudiciables à leurs propres clients. L’analyse de ces cas ambigus nous aidera à clarifier les principes qui devraient sous-tendre les normes professionnelles”. L’exercice même de déterminer de telles normes lui apparaît salutaire pour la crédibilité de la profession académique.
Source: Reuben, Julie A., “Where Academic Freedom Ends“, The Chronicle of Higher Education, 19 novembre 2020