Comme plusieurs, j’avais pris vaguement conscience que les sports électroniques (jeux vidéos joués en compétition) entraient dans les écoles secondaires et les cégeps du Québec (notamment en Estrie). La Fédération québécoise de sports électroniques comptait l’an dernier 18 membres collectifs (établissements scolaires et associations étudiantes), dont des clubs des universités de Montréal, McGill, Concordia, l’UQAM, l’ÉTS, ainsi que ceux des cégeps de Matane, Dawson, La Pocatière, Shawinigan, Montmorency, Édouard-Montpetit et quelques écoles secondaires. Aux États-Unis, la National Association of Collegiate Esports est passé de six colleges membres en 2016 à 27 en 2017 et en compte désormais plus de 160… Outre l’intérêt de capitaliser sur ce loisir prisé des jeunes pour favoriser le recrutement, je ne comprenais pas très bien pourquoi des institutions de formation s’aventuraient sur ce terrain pour le moins glissant… Un article américain m’a aidé à y voir plus clair:
If Gen Z college students aren’t as interested in traditional sports, and aren’t bonding with fellow undergraduates at college football or basketball games, how would they develop a sense of school spirit? Would they feel any pride in their university?
“What we know, is that if we can get our students involved in something … they are much more likely to stay with us and graduate,” says University of Utah President Emeritus David Pershing, “and that’s the ultimate goal.”
A Gallup-Purdue Index Report from 2014 found that of graduates who had joined an on-campus club or organization, 21% felt emotionally attached to their schools, compared with 14% of non-club-attending graduates. That emotional attachment not only predicted higher graduation rates but increased “thriving” in later life.
Il s’agit donc de développer un sentiment d’appartenance pour augmenter la motivation scolaire, la persévérance et, éventuellement, le succès des études:
The teams and scholarships weren’t recruiting gimmicks, emphasizes Kurt Melcher, executive director of esports for RMU [Robert Morris University] Illinois. Rather, they offered a “new student demographic an opportunity to participate in athletics and increase student engagement,” he said.
Today RMU has more than 80 esports athletes decked out in uniforms, warmup outfits and backpacks, like any other collegiate athlete.
“They’re so proud of being able to represent the university for what they’re passionate about, they never take that stuff off,” Melcher laughs. “They’re wearing it nonstop. It adds to our school community.”
Ajoutons que les étudiantes et étudiants qui se joignent à ces équipes ont un « profil socioculturel » assez différent de ceux qui se joignent habituellement aux équipes de sport plus traditionnels. C’est donc une façon de rejoindre un autre groupe de jeunes tout aussi à risque de décrocher des études… Par exemple, les universités américaines offrent des bourses d’études à ces athlètes nouveau genre, permettant à de nouveaux étudiants d’accéder à des programmes d’enseignement supérieur. Ces bourses demeurent cependant rares: « Only 2% of high school athletes receive a scholarship to play a traditional sport in college, and experts estimate the odds of getting an esports scholarship are even lower. »
De même, si le sport électronique universitaire semble fleurissant, ses débouchés restent limités…. Contrairement au football ou au basketball, les chances que ces étudiants soient un jour recrutés pour devenir sportifs professionnels sont extrêmement faibles. Dans le milieu, on parle d’une possible « bulle » du e-sport, alors que, malgré d’importants investissements, les nombreux spectateurs ne paient généralement pas un sou pour regarder les matchs sur Internet. Il n’y a donc pas encore de monétisation.
Mentionnons enfin que les initiatives québécoises en e-sport souhaitent également devenir des espaces où seront mises en valeur de saines habitudes de vie, alors que le temps d’écran est limité et l’activité physique – pour garder la forme – encouragée.
Sources:
“Concentration en sports électroniques au Mont-Sainte-Anne : la Santé publique inquiète” (entrevue radio), Par ici l’info, Radio-Canada,
“Les sports électroniques font leur entrée au Cégep de Sherbrooke“, Ici Estrie, Radio-Canada,
Béland, Gabriel, “Le sport électronique entre au cégep“, La Presse, 16 février 2017
Israelsen-Hartley, Sara, “The new college athlete: Why universities are investing in video games“, Desseret News, 18 août 2019
Noël, Mélanie, “Du e-sport au cégep“, La Tribune, 18 avril 2019
Un texte du eCampus News vient compléter mon article de la semaine dernière: Ascione, Laura, “5 ways esports is impacting education right now”, eCampus News, 4 septembre 2019
https://www.ecampusnews.com/2019/09/04/5-ways-esports-impacting/?ps=js.dube@usherbrooke.ca-0013000000j0tEH-0033000000qhz6Y&esmc=92994
Un autre article proposé par Alain Mélançon:
Shelton, Bret E. et Chris “Doc” Haskell, « FAQ Five: How Do You Start a University Esports Program? », edTech Magazine, 16 mars 2020
https://edtechmagazine.com/higher/article/2020/03/faq-five-how-do-you-start-university-esports-program
Shelton et Haskell y résument leur livre où il est précisément question du démarrage d’une équipe d’élite en sports électroniques, les liens avec l’apprentissage, les programmes de bourses à mettre sur pied, etc.