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Les nouvelles frontières de l’intégrité

L’Institut de recherche et d’action sur la fraude et le plagiat académiques (IRAFPA) tiendra son 2e  Colloque international de recherche et d’action à l’Université de Coimbra (Portugal) du 16 au 18 juin 2022.

Le Colloque propose 7 thèmes qui, selon le comité organisateur, marquent les nouvelles frontières de l’intégrité.  Les voici, accompagnés pour chacun d’un extrait de leur présentation :

Des contributions mettant en perspective les enjeux de la professionnalisation de la fraude et les dérives de ces multiples « professionnalisations », ou au contraire des expériences qui sont susceptibles de rompre avec cette fatalité du « publish or perish » (qui conduit le chercheur à oublier qu’il est un « chercheur » et pas un « publieur » et l’étudiant que son but est d’apprendre, de développer ses capacités et non de décrocher à n’importe quel prix un diplôme), sont les bienvenues. La question du temps semble centrale : le temps de travailler, le temps de penser, le temps d’apprendre à penser, le temps de s’immerger dans son « sujet », le temps de la subtilité et de la précision, le temps de l’échange approfondi, le temps de l’écriture, peut-être même le temps du rêve… Bref tout ce que la productivité interdit.

La question du plagiat et de l’intégrité scientifique se situe pleinement dans l’actualité, avec, d’une part, des pratiques frauduleuses croissantes et, d’autre part, un travail de plus en plus organisé d’information et de prévention en matière de déontologie scientifique. Cependant, le chantier reste crucialement ouvert et exige une mobilisation des chercheurs pour renforcer et inventer de nouveaux horizons, favorables à une meilleure reconnaissance de l’intégrité et de la vérité au sein de la communauté scientifique.

Quelle confiance accorder à la science ? Les scientifiques trichent-ils et mentent-ils ? Les institutions (EPIC, EPST, universités…) et les revues scientifiques assument-elles leurs responsabilités, ou sont-elles négligentes, voire complaisantes avec les manquements ? Comment la science dépend-elle aussi des relations géopolitiques entre les grandes puissances ? Ces questions et soupçons sont restés longtemps confinés aux seuls initiés, mais la crise de la COVID-19 les a portés sur le devant de la scène publique. Elle en avive l’urgence et la radicalité en interrogeant la façon dont nous produisons la connaissance scientifique dans un régime d’accélération, de concurrence et d’impacts sociaux, financiers, politiques majeurs, où la science n’est plus la solution mais fait partie du problème.

La question du plagiat et de l’intégrité scientifique se situe pleinement dans l’actualité, avec, d’une part, des pratiques frauduleuses croissantes et, d’autre part, un travail de plus en plus organisé d’information et de prévention en matière de déontologie scientifique. Cependant, le chantier reste crucialement ouvert et exige une mobilisation des chercheurs pour renforcer et inventer de nouveaux horizons, favorables à une meilleure reconnaissance de l’intégrité et de la vérité au sein de la communauté scientifique.

  • thème 5 : Le conflit d’intérêts au cœur des relations économiques et médiatiques

    Les conditions de financement de la recherche (ANR, Projets européens, intérêts des acteurs privés financeurs de la recherche) ont été au cœur de nombre d’interrogations et souvent dénoncées avec force. De nouvelles modalités d’interaction des scientifiques avec la cité (chaînes YouTube, prise de parole sur les blogs et dans les médias et réseaux sociaux, etc.) ont par ailleurs émergé dans des proportions inconnues. Cela suscite d’autant plus d’interrogations quant au devenir du principe de liberté académique qui gouverne les processus de la recherche scientifique, plusieurs scientifiques ayant été rappelés à l’ordre par leurs tutelles (ordre des médecins, CNRS, etc.) voire démis de leurs fonctions.

Le sujet des conflits d’intérêt appelle d’urgence un regard neuf des communautés scientifiques alors même que le modèle économique propre au monde médiatique (recherche d’audience instantanée, incitation aux « clashs », etc.) peut à l’évidence entrer en conflit avec le temps propre au domaine scientifique.

L’ouverture de l’accès à la publication scientifique (Open Access) passé de mouvement militant à une réalité économique et politique, de même que les avancées récentes en matière d’ouverture des données de la recherche, ou bien l’inclusion des citoyens dans la pratiques des sciences concrétisent tous les jours un peu plus l’entreprise de l’ouverture de la science. Des savoirs scientifiques et des savoirs profanes se conjuguent pour consolider les démocraties ; la science se doit de rester ouverte aux savoirs ancestraux ou autochtones, dont elle ne maîtrise peut-être pas encore la rationalité, les tenants et les aboutissants, comme le préconise très justement la recommandation de l’UNESCO sur la science ouverte. Pour autant, dans le contexte actuel de la numérisation de la société (Miège, 2020) et du déploiement des infrastructures numériques de la recherche, l’ouverture de la science oscille entre les opportunités véritables qu’elle propose et les risques nombreux que cette ouverture représente (Funtowics & Ravetz, 1999).

La question urgente se pose : les « comités d’éthique de la recherche » sont-ils un instrument significatif de promotion de l’intégrité scientifique et doit-on renforcer leur rôle ? Ou doit-on plutôt considérer qu’il s’agit de renforcer le rôle d’autres cadres de régulation institutionnelle (ex. commission de déontologie au sein d’une université, ou encore comités ad hoc au sein de chaque laboratoire de recherche) ou collective (ex. sociétés savantes) ?

Assurément, un colloque qui soulève des enjeux fondamentaux auxquels sont confrontés tous les établissements universitaires où il se fait de la recherche et de la formation à la recherche.

Source

Bergadaà, Michelle.  Intégrité académique, lettre 87.  Site de l’IRAFPA.  26 octobre 2021.

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Sonia Morin

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