Interne: Rapport d’étonnement – Visite « espaces physiques d’apprentissage » à l’Université Laval

Dans le cadre de notre veille sur les espaces physiques d’apprentissage, je me suis rendu à l’Université Laval le 31 août 2016, pour y rencontrer Steve Vachon, un des membres du groupe de travail qui a accouché de l’excellent rapport Repenser les espaces physiques d’apprentissage paru en 2013. Une délégation de l’Université de Sherbrooke avait déjà visité certaines salles d’apprentissage actif à Laval, mais je souhaitais discuter de cette thématique plus largement. Au nombre de mes questions:

Qu’est-ce qu’une politique sur les espaces d’apprentissage signifie pour une institution universitaire?
Pourquoi investir temps et argent dans de telles infrastructures lorsqu’une part de plus en plus importante de la formation se donne en ligne?
En contexte de restrictions budgétaires, devrait-on spécialiser les locaux ou au contraire les rendre polyvalents?

Personnes rencontrées

Steve Vachon, directeur adjoint, développement pédagogique, Bureau du soutien à l’enseignement (BSE)
Stéphane Dorais, responsable facultaire des technologies de l’information et du soutien pédagogique à la Faculté des sciences de l’administration (FSA).
Didier Paquelin, professeur, Sciences de l’éducation

Locaux visités

Salle d’apprentissage actif, Bibliothèque 2^e étage – Droit et sciences sociales (42 places)
- Prix approximatif de rénovation de la salle : 70 000$,
- C’est la salle qui a été mise en valeur dans les médias universitaires,
- Puisque c’est la première, on commence à en voir les améliorations possibles. Par exemple, les écrans de télé éloignés des murs font que des étudiants se frappent la tête sur les coins. Dorénavant, le BSE recommande de coller les écrans au mur.
- On me fait voir une autre salle vitrée, plus proche d’une salle de formation traditionnelle, au 4^e étage de la Bibliothèque.
  - Un aspect intéressant : une partie du mobilier est amovible, tandis qu’une autre est fixe. Cela aide à replacer le mobilier entre les cours.
Salle d’apprentissage actif, Génie-Sciences (120 places)
- Prix approximatif de rénovation de la salle : 90 000$,
- Contrairement à plusieurs salles, on a fait ici le choix de limiter l’envoi des signaux vidéo du centre vers la périphérie sur la matrice Crestron. Cela a permis une économie substantielle et présente un certain intérêt pédagogique lorsque l’on demande à un étudiant présentateur de se déplacer au podium central pour animer la classe.
- Impressionnant que l’aménagement permette d’être confortable à 120 dans la salle de génie. On suppose que le bruit peut devenir un problème.
- Panneaux transparents qui se givrent pour devenir des surfaces inscriptible (conception de la Faculté de génie de Laval)
Salle d’apprentissage actif, Carré des affaires, Faculté des sciences de l’administration (42 places)
- Prix approximatif de rénovation de la salle : 156 000$
- Ici le podium du professeur a été ramené à l’avant, à la demande des enseignants consultés.
- Surfaces inscriptibles limitées à d’étroits espaces givrés sur les vitres. Il semble y avoir moins de besoins de ce côté…
- Tout le mobilier a été dessiné après consultation d’enseignants et l’appel d’offre a été envoyé à des créateurs de meubles plutôt qu’à des fournisseurs qui offrent essentiellement les produits auxquels ils ont accès rapidement.
- Caméra qui se rétracte dans le plafond pour que l’on sache si elle est active ou non. Selon Steve Vachon, c’est une demande de plus en plus importante des directions facultaires et de programmes pour enregistrer les cours et les mettre en ligne, à l’intention des étudiants qui auraient manqués ou qui souhaiteraient reprendre un cours.
Salle Power Corporation du Canada dans le Carré des affaires de la FSA (une centaine de places)
- Salle multimédia avec un mur d’écrans VuWall et deux caméras rétractables
- Systèmes de micros sans fil, hauts-parleurs encastrés, etc.
- Destinée à des événements de presse, des conférences ou colloques.
On me mentionne l’existence au Pavillon De Koninck de deux salles avec mobilier sur roulettes et surfaces inscriptibles mais sans appareils audiovisuels. Une professeure de psychologie y fait de l’apprentissage actif sans soutien technologique.

Depuis le rapport du groupe de travail

Le rapport de 2013 proposait une dizaine de recommandations à la direction de l’Université Laval. J’ai voulu savoir comment les choses avaient évoluées depuis:

Il n’y a pas de politique ou de budgets particuliers pour la rénovation des espaces d’apprentissage, mais le BSE obtient davantage d’écoute qu’avant le rapport.
- Des fonds d’innovation pédagogique peuvent être obtenus pour de telles rénovations, mais il s’agit de petites sommes au regard des coûts de telles installations.
- Les associations étudiantes sont parfois prêtes à investir dans de tels projets… pour ajouter des prises de courant qui serviront à leurs membres, par exemple.
Le BSE joue un peu le rôle de consultant des facultés pour la conception de ces salles. Il n’y a pas de conflit avec le Service des immeubles qui est content d’arriver quand le projet a été bien clarifié, notamment au niveau audiovisuel.
Une éventuelle politique des espaces d’apprentissage est toujours un projet qui refait surface à l’occasion.
Néanmoins, il y a eu rapprochement entre le Service des immeubles, le Bureau des événements campus et le BSE, de même que le Service des bibliothèques. Ces différentes parties prenantes se rencontrent une fois par année pour discuter des projets de rénovation à venir.
Les facultés qui acceptent de recevoir le soutien du central pour la rénovation de leurs locaux, acceptent également de devoir parfois prêter ces locaux à du personnel enseignant d’autres facultés.
Un nouveau système de gestion informatisée des locaux est en implantation. Il permettra de connaître la localisation, le nombre de place, le matériel disponible, mais aussi l’utilisation habituelle d’un local (ex: pédagogie active, cours magistraux, etc.).
D’après le Service des immeubles, il n’y a pas de problèmes de locaux à Laval, mais plutôt un problème d’étalement des utilisations dans le temps.
IMPORTANT: Plusieurs pavillons de l’Université Laval ont été construits dans les années 1950. Ils arrivent donc à une échéance de mise aux normes. C’est donc un moment privilégié pour profiter de ces rénovations et améliorer les facteurs physiques qui favorisent l’apprentissage.
S’il mentionne qu’il est délicat de trouver un équilibre entre la polyvalence et la spécialisation d’un local, Steve Vachon doit admettre qu’il a peu de demandes pour des locaux autres que des salles d’apprentissage actif. De même, peu d’espaces informels (corridors, cafétérias, etc.) font l’objet de rénovations qui amélioraient l’apprentissage.

Plus-value?

Pour Steve Vachon et Didier Paquelin, le résultat est probant: les nouveaux locaux sont un vecteur de changement important des pratiques enseignantes. Ce n’est pas le seul, mais il faut s’en préoccuper.
Steve et Didier se demandent: Que faut-il à un espace pour le qualifier de « salle d’apprentissage actif »?
Le professeur Paquelin souligne l’importance de progresser lentement, de faire un suivi de l’utilisation réelle des locaux par les enseignants et les étudiants. Le BSE cherche à collecter ce genre de données, mais ce n’est pas toujours possible.
Deux étudiantes d’architecture ont été embauchées par le BSE pour comparer une vingtaine de guides d’aménagement de classes provenant de diverses universités. L’objectif : faire ressortir les points communs. À terme, le BSE veut se servir de cette étude et de l’expérience acquise sur le terrain pour rédiger un guide de bonnes pratiques à l’intention des facultés.
Malgré les progrès de la formation à distance (18 % des crédits décernés par l’Université Laval proviennent désormais de la FAD), il y a encore une clientèle majoritaire qui privilégie une expérience universitaire “sur le terrain”. On doit donc en tenir compte.