Données éducatives Pédagogique

De l’orientation plutôt que des bourses pour accéder à l’université ?

La professeure Laëtitia Renée, du Département de sciences économiques de l’Université de Montréal, a réalisé une étude dont les résultats ont été publiés récemment dans l’American Economic Journal: Applied Economics.  Ses conclusions? « Pour améliorer l’accès à l’enseignement supérieur chez les jeunes issus de familles à faible revenu, l’orientation scolaire s’avère plus puissante que les incitatifs financiers. »

Les données initiales qu’elle a utilisées proviennent de la Société de recherche sociale appliquée, à partir d’une étude longitudinale menée auprès de plus de 4000 élèves de 30 écoles secondaires du Nouveau-Brunswick, suivis jusqu’à l’âge adulte.  Concrètement, quatre groupes aléatoires ont vécu des approches différentes:

  • Un groupe a participé pendant trois ans à des séances d’orientation scolaire («Au cours des séances, ils sont amenés à réfléchir à leurs champs d’intérêt, à leurs objectifs et aux moyens concrets de les atteindre. Ils doivent rédiger, planifier et revoir leur trajectoire future à la lumière de nouvelles informations.», explique la professeure Renée);
  • Un groupe a reçu du soutien financier (9600 $, en plus du programme de bourses) en tranches réparties pendant deux ans, conditionnel à l’inscription dans un collège communautaire ou une université;
  • Un groupe mixte, combinant les deux approches;
  • Un groupe témoin.

« Les résultats ont montré que, quatre ans après l’implantation du programme d’orientation à long terme, l’accompagnement personnalisé a permis d’augmenter de 10 points de pourcentage l’inscription à l’université chez les élèves de familles à faible revenu, réduisant de 70 % l’écart avec leurs camarades plus favorisés, ce qui représente aussi une hausse de 50 % par rapport au groupe témoin. »

D’autres résultats: « une décennie plus tard, les élèves ayant suivi le programme d’orientation à long terme voyaient, lorsqu’ils atteignaient l’âge de 29 ans, leur revenu annuel moyen augmenter de 2700 $, soit 10 % de plus que ceux qui n’avaient pas suivi le programme » [nos emphases].  Pour cette économiste, le programme d’orientation scolaire permet « d’engendrer un bénéfice net estimé à 50 000 $ par élève, notamment grâce à l’augmentation des revenus et des impôts perçus », alors que le soutien financier « ne s’accompagne pas de recettes fiscales supplémentaires par l’entremise de meilleurs revenus futurs ».

Laëtitia Renée explique: «Ce que ce programme [les séances d’orientation] essaie de changer, c’est le référentiel de ces jeunes. Quand on n’a autour de soi que des gens qui n’ont pas fait d’études supérieures, même avec de bonnes notes, on n’envisage pas forcément l’université. […] Ce qu’on apprend, c’est que l’information, la motivation et la capacité à se projeter sont des ressources aussi précieuses que l’argent et elles sont souvent absentes chez les jeunes les plus vulnérables » [nos emphases].

Elle ajoute que «…[l]’aide financière seule n’a pas ce pouvoir transformateur ».  Dans une moindre mesure, le groupe ayant reçu un soutien financier s’est inscrit davantage dans les collèges (5 %) et les universités (4 %) que les personnes du groupe témoin, mais sans toutefois que cela n’influence l’obtention d’un diplôme universitaire.

De même, « certains élèves que le programme d’orientation scolaire avait incités à s’inscrire à l’université ont abandonné leurs études en cours de route. Un soutien complémentaire pourrait être nécessaire pour garantir son plein succès ».  La professeure Renée recommande donc la prudence.

« Le programme d’orientation professionnelle comprenait plusieurs éléments. Il reste une question importante : quelles caractéristiques du programme ont été les plus efficaces pour améliorer les résultats des personnes étudiantes. Le design de l’expérience ne permet pas de démêler les effets de ces différentes caractéristiques. Cependant, des études antérieures suggèrent que les programmes d’orientation et de soutien en personne sont plus efficaces pour augmenter le nombre d’inscriptions dans les collèges que les programmes légers qui ne fournissent que des informations (Carrell et Sacerdote 2017 ; French et Oreopoulos 2017 ; Dynarski et al. 2023). Selon French et Oreopoulos (2017), les programmes les plus efficaces sont ceux qui « rendent le processus d’accès à l’université plus facile et plus évident ». Cela suggère qu’une composante importante du programme consistait à aider les personnes étudiantes à élaborer des plans concrets pour les études supérieures. D’autres recherches devraient toutefois être menées pour comprendre pleinement comment la conception des programmes d’orientation influe sur leur efficacité à long terme. » (Renée, 2025; traduit avec DeepL.com, puis ajusté) [nos emphases]

Sources:
Université de Montréal (9 juin 2025), Une boussole plutôt qu’un chèque: l’orientation scolaire pour réduire les inégalités (communiqué de presse), AMEQ en ligne, Mascouche, Québec

Renée, Laetitia (avril 2025), « The Long-Term Effects of Career Guidance in High School and Student Financial Aid: Evidence from a Randomized Experiment », American Economic Journal: Applied Economics, vol. 17, no. 2 (pp. 165–83)

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À propos de l'auteur

Jean-Sébastien Dubé

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