Pendant mes années d’études aux cycles supérieurs, j’ai développé un vif intérêt pour la rétroaction. Personnellement, je paniquais à voir le nombre de commentaires dans mes travaux, même si la plupart étaient positifs ou constructifs, alors que j’avais déployé des efforts incalculables. J’ai alors pris conscience de ce talon d’Achille chez moi. Depuis que j’enseigne au microprogramme en pédagogie de l’enseignement supérieur (MPES) et que je suis devenue conseillère pédagogique, je tente d’outiller les personnes enseignantes sur ce sujet. Hier soir, lors d’une séance synchrone, les collègues du cours EPU960 et moi avons rapidement discuté de la rétroaction et de la manière de la gérer avec les personnes étudiantes.
Dernièrement, j’ai questionné mes collègues sur LinkedIn concernant des moyens, des outils ou des méthodes pour accompagner les personnes étudiantes à recevoir de la rétroaction. J’ai reçu plusieurs pistes que je souhaite explorer dans les prochains mois. Un texte proposé par Marie-Claude Cyr a particulièrement suscité mon intérêt: « S’outiller pour mieux participer à la rétroaction : Un nouveau modèle cognitivo-comportemental destiné aux apprenants en médecine » de Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc (2023). Une collègue de la FLSH et la FMSS, Veronik Lamoureux, me confirme que c’est le modèle utilisé dans les simulations cliniques à la FMSS pour les entrevues motivationnelles, alors que les personnes étudiantes invitent les patients standardisés à changer une ou des habitudes de vie.
Comme les auteurs le mentionnent, « recevoir des commentaires du superviseur suscite des émotions et les accepter n’est pas facile [alors que peu d’études] s’attardent à les outiller [les personnes étudiantes] à mieux réagir à la rétroaction » (Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc, 2023, p. 6).
La méthode H.O.T.E.
La méthode H..O.T.E. propose de mettre l’accent sur l’Humilité, l’Ouverture d’esprit, la Ténacité et l’Explicitation dans une volonté d’améliorer les apprentissages et de développer des compétences.
Ainsi, « à partir d’attentes prédéfinies (feedup), l’apprenant partage son auto-évaluation citant ses réussites et ses difficultés. En fonction du rendement observé et de la teneur de l’auto-évaluation de l’apprenant, le superviseur formule des commentaires constructifs et amorce une discussion sur le rendement de l’apprenant tout en justifiant ce qui devrait être amélioré ou ce qui a été bien accompli (feed back). L’interaction se conclut par l’élaboration en collaboration d’un plan et d’un suivi qui facilitent les changements proposés (feed forward) » (Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc, 2023, p. 7).
Ici, la proposition implique que « les apprenants [ne] demeurent [pas] ignorants du rôle qu’ils doivent jouer lors de la rétroaction, ce qui en fin de compte, les empêche de participer pleinement aux discussions visant l’amélioration » (Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc, 2023, p. 7). La méthode H.O.T.E. permet à la rétroaction d’être au service de l’apprentissage en allant bien au-delà du simple sandwich (positif-négatif-positif). Par cette méthode, la personne enseignante…
- encourage l’autoévaluation,
- informe la personne apprenante de sa performance et
- encourage un apprentissage transformatif avec un plan et un suivi qui se présente comme « une occasion de croissance personnelle et professionnelle »
(Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc, 2023, p. 8).

Tableau 1 : Habiletés personnelles facilitant l’apprentissage en relation aux éléments du modèle H.O.T.E (Bouchard Lamothe, Rowe, Boet et Denis-Leblanc, 2023, p. 9)
En somme, l’humilité invite la personne étudiante à faire preuve d’une vision réaliste de ses forces et ses faiblesses par rapport aux attentes de performance. Cela implique une reconnaissance réelle de ses compétences, tout en réalisant que la rétroaction est une occasion d’apprendre plutôt qu’une attaque personnelle (je me reconnais ici!). L’ouverture d’esprit invite à accepter que la version initiale d’un travail, par exemple, puisse être remise en question dans une volonté d’exploration et d’approfondissement et non de menace. La tenacité, pour sa part, consiste à continuer à solliciter des commentaires constructifs, dans un but de progression afin de d’approfondir sa quête d’apprentissage, et ce, malgré les difficultés. L’explicitation permet à la personne étudiante de verbaliser ses pensées et son raisonnement dans l’autoévaluation, afin que la personne enseignante comprenne mieux l’atteinte d’un niveau de performance et puisse adapter la rétroaction, le plan ainsi que le suivi.
Je suis curieuse de voir comment cette méthode peut permettre, en partie, de bonifier l’enseignement universitaire à l’ère de l’IAg.
Source: Bouchard Lamothe, D., Rowe, J., Boet, S. & Denis-LeBlanc, M. (2023). S’outiller pour mieux participer à la rétroaction : un nouveau modèle cognitivo-comportemental destiné aux apprenants en médecine. Canadian Medical Education Journal / Revue canadienne de l’éducation médicale, 14(3), 6–13. https://doi.org/10.36834/cmej.74419