Pédagogique

Styles d’apprentissage : des explications supplémentaires

Les études réfutant l’hypothèse que l’on apprend mieux si l’enseignement qu’on reçoit est adapté à notre style d’apprentissage (voir mon billet récent) soulèvent la question de comment expliquer et traiter les différences entre les apprenants. Les professeurs de psychologie Cedar Riener et Daniel Willingham répondent à ces questions dans un article du magazine universitaire Change et dans une vidéo publiée sur YouTube (environ 7 minutes).

En résumé, les auteurs admettent qu’il existe de nombreuses différences entre les apprenants et que plusieurs de ces différences ont un impact significatif sur leur apprentissage. S’ils rejettent l’idée que les styles d’apprentissage en font partie, voici les différences qui importent selon eux :

  • Les notions de talent, d’habileté (ability) et d’intelligences
  • Les intérêts personnels
  • Les connaissances et conceptions antérieures, tant celles qui sont justes que celles qui sont erronées
  • Les éventuels handicaps et troubles d’apprentissages

On admet donc volontiers des différences entre les apprenants. Le contraire serait absurde! Ce qui est contesté, c’est l’idée qu’il existe des styles d’apprentissage qui ont une implication indépendante des dimensions mentionnées ci-haut, implication qui serait significative pour l’apprentissage. Les études semblent démontrer que les apprenants ont bel et bien des préférences (des « styles »), mais le fait de tester celles-ci dans des conditions contrôlées montre qu’elles n’ont pas d’incidence significative sur l’apprentissage.

Si une certaine ouverture à étudier davantage la question existe, les auteurs sont sans appel sur une chose : le fardeau de la preuve est sur ceux qui affirment qu’il y a des gains significatifs à adapter l’enseignement selon les styles d’apprentissages. D’ici à une éventuelle preuve, on devrait consacrer les efforts de personnalisation de l’enseignement à des dimensions dont les effets sont déjà prouvés. Par exemple, mieux adapter le niveau de l’enseignement aux connaissances et aux habiletés des apprenants. Outre la personnalisation de l’enseignement, des interventions plus générales sur les facteurs qui influencent la motivation sont proposés.

Plus spécifiquement au sujet de la typologie auditif/visuel/kinesthésique, la sélection du canal de communication (auditif , visuel, multimédia) devrait être en fonction essentiellement du type de contenu et des autres dimensions personnelles mentionnées précédemment. L’enjeu n’est pas le mode de présentation de l’information, mais plutôt la capacité de l’apprenant à traiter cette nouvelle information et la façon dont il va la traiter. Pour cela, une évaluation des connaissances antérieures avant une leçon est plus utile qu’une évaluation du style d’apprentissage.

Sources :

Riener, Cedar et Daniel Willingham, « The Myth of Learning Styles », Change, septembre-octobre 2010.

Willingham, Daniel, Learning Styles Don’t Exist (vidéo), YouTube, durée : 6 min 55, mis en ligne le 21 août 2008.

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