Cycles supérieurs

L’intégrité dans une thèse : une responsabilité partagée

En raison d’un nombre importants de copiés-collés présent dans une thèse (un taux de 76 %), l’Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne vient de décider d’annuler l’épreuve de soutenance de cette thèse en droit de 2015, ce qui du coup entraîne le retrait du diplôme de doctorat, et d’exclure définitivement l’auteur de tout établissement d’enseignement supérieur.  Selon le diplômé jugé fautif, « [i]l n’y a pas de plagiat dans cette thèse, à aucun moment je ne récupère une idée de quelqu’un d’autre, se défend-il. Par contre, c’est vrai, il y a un problème de forme, les citations ne sont pas mises au bon endroit. »   

Ce qui retient mon attention dans ce cas, c’est cet argument avancé par le plagiaire : « Si moi je suis dans la fraude je ne le suis pas (sic), alors la Sorbonne est complice puisqu’elle a validé toutes les étapes de ma thèse ». 

L’article du Monde rapporte effectivement des irrégularités qui pointent vers un dysfonctionnement dans le processus de réalisation et d’évaluation de la thèse.

  • Le jury était composé de personnes dont le profil manquait de proximité avec le sujet de la thèse.  « Il est très inhabituel de désigner comme prérapporteur d’une thèse un enseignant-chercheur qui n’appartient pas à la discipline dans laquelle est soutenue la thèse ».
  • Par contre, le doctorant et les membres du jury entretenaient des liens très proches, s’apparentant à des conflits d’intérêts, qui peuvent laisser croire à l’octroi d’une thèse de complaisance, du moins selon un professeur de droit d’une autre université.
  • Pas un membre du jury n’a décelé du plagiat et la thèse n’a pas été soumise au logiciel de détection de similitudes dans le texte que possède Paris-1.
  • Aucun rapport de soutenance, pourtant obligatoire, n’a été produit.  Le directeur de thèse « déclare qu’il croit se souvenir avoir rédigé lui-même un tel rapport, mais que malheureusement il a été victime d’un vol de ses affaires et notamment de son ordinateur portable et qu’il ne dispose plus de traces électroniques d’un tel document ».
  • Le jury a accepté que la thèse soit placée sous le sceau de la confidentialité pour 30 ans.  La demande émanait du doctorant lui-même.

« L’annulation d’une thèse en France, et le retrait du titre de docteur, c’est extrêmement rare, fait remarquer Michelle Bergadaà, professeure émérite à l’Université de Genève, qui travaille sur le plagiat depuis quinze ans. À ma connaissance, ce n’est jamais arrivé par les procédures internes des universités, il y a seulement eu quelques cas devant les tribunaux. Il faut tirer les leçons de ce cas, c’est le système qui doit être repensé autour de l’intégrité de la recherche. » 

L’intégrité en recherche appartient autant aux étudiants, qu’aux professeurs qu’aux membres d’un jury. C’est une responsabilité commune.

Source

Bouchez, Y. et Stromboni, C.  Une thèse annulée pour plagiat déstabilise Paris-1.  Le Monde.  28 juillet 2020 (accessible via Eureka.cc)

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À propos de l'auteur

Sonia Morin

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