Pédagogique Technologique

Méthodes actives en contexte de distanciation: possibles ou pas?

Dans cet article, Doug Lederman, éditeur du Inside Higher Ed, tente de répondre à la question suivante: compte tenu des mesures de distanciation physique prévues à l’automne, « comment mener un apprentissage actif […] sous de telles contraintes? » L’apprentissage actif est ici compris largement comme « toute stratégie d’enseignement qui engage tous les élèves de manière significative dans le processus d’apprentissage ». Une inquiétude sous-tend sa question: un retour de l’enseignement magistral, dont on a souvent démontré l’efficacité moindre, est-il inéluctable?

Ajoutons à cela l’injonction de nombreuses institutions devant la crainte d’une seconde vague de l’épidémie: “Soyez prêt à tout” pour l’automne – en face-à-face, en ligne ou en quelque chose d’hybride. Comme l’observe assez candidement une enseignante: « se préparer à toutes les possibilités est tout simplement écrasant, épuisant et finalement impossible ».

Lederman raconte comment Christopher Heard, professeur de la Division religion et philosophie de l’Université Pepperdine (Malibu, Californie) et directeur du Center for Teaching Excellence au Seaver College, a fait appel à une communauté de pratiques en ligne pour explorer cette question. Adepte convaincu des méthodes actives, le professeur Heard résumait ainsi la situation pour le bénéfices des membres de sa communauté.

  • Certains experts de la santé recommandent que les étudiantes et étudiants soient tous tournés dans la même direction pour éviter de propager les germes, même avec les masques qu’ils porteront presque certainement.
  • Les étudiantes et étudiants pourraient avoir du mal à s’entendre sans élever la voix à deux mètres de distance – et toute voix élevée pourrait perturber le groupe qui se trouve à son tour à deux, trois ou quatre mètres de distance.
  • On découragera fort probablement les étudiantes et les étudiants de partager les marqueurs de tableau blanc (souvent utilisés pour les séances de remue-méninges).
  • Les enseignantes et les enseignants ne seront pas autorisés à passer d’un groupe d’étudiants à un autre.

Il en conclut que tout cela limite passablement les travaux de réflexion en équipes souvent associés à l’apprentissage actif.

Parmi les nombreuses réponses qu’il a reçues, Robert Talbert, professeur et directeur du Département de mathématiques à l’Université Grand Valley State du Michigan [dont nous avons souvent parlé] évoque la méthode peer instruction qui fonctionnerait même avec la distanciation. Après tout, cette méthode a été développée pour dynamiser la prestation de cours dans de grands amphithéâtres.

En gros, les participants qui ont répondu à l’appel du professeur Heard se répartissent en deux camps:

  • il y a ceux qui croient que l’intégration de méthodes actives est tout de même jouable et qui proposent l’utilisation en présence des appareils personnels des étudiantes et étudiants pour voter ou intégrer leurs contributions lors d’éventuels captations vidéo. On mentionne même la possibilité d’avoir à la fois des équipes en présence et d’autres à distance, puis de les faire collaborer. Pour remédier aux problèmes de son, alors que les étudiantes et étudiants devront hausser la voix pour s’entendre, certains suggèrent même ou la diffusion audio de logiciels de webconférence pour rediffuser la voix aux autres portables dans la classe physique et s’assurer que tous les participants entendent bien.
  • d’autres, comme Norman Clark, directeur administratif des programmes académiques du Center for Learning Innovation de l’Université du Minnesota à Rochester, estiment que la formation à distance serait de meilleure qualité qu’un enseignement en présence aussi hypothéqué, alors que des outils technologiques permettent désormais l’intégration de méthodes actives.
    • We’ve spent the last few decades developing and improving tools to facilitate collaboration at a distance. Now, when we HAVE to be at a distance, shouldn’t we maximize the effectiveness of our collaboration, and minimize the risk, by using these tools?

Et vous, comment envisagez-vous l’enseignement cet automne? L’intégration de méthodes actives vous apparaît-il possible en présentiel? Devra-t-on revenir à l’enseignement magistral?

Source: Lederman, Doug, “Can Active Learning Co-Exist With Physically Distanced Classrooms?“, Inside Higher Ed, 27 mai 2020.

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Jean-Sébastien Dubé

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