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Plagiat – Fraudeurs en série et réhabilitation

Le 8 avril dernier, Le Monde publiait un article de Jean-Luc Mélenchon sur l’affaire Rigaux.

Rigaux, c’est Dominique Rigaux, une professeure d’histoire de l’Université de Grenoble, dont les publications ont fait l’objet de deux rapports (2014 et 2016 – pas trouvé) produits selon la méthode développée par la professeure Michelle Bergadaà qui mettent en lumière des preuves de plagiat si nombreuses que leur nombre fait dire aux auteurs «c’est vraiment trop systématique pour y voir autre chose qu’une volonté délibérée.»  Le deuxième rapport a été produit pour trois raisons :

  • une action: Mme Rigaux, loin de présenter des excuses à sa communauté, après la publication du premier rapport en 2014, a intenté un procès en diffamation à… Michelle Bergadaà (Université de Genève)Le TGI  (tribunal de grande instance) de Grenoble, le 16 février dernier, l’a déboutée de toutes ses demandes […].
  • un silence et une inaction: Mme Rigaux a perdu son poste de vice-présidente de l’Université de Grenoble mais obtient son soutien.  La communauté scientifique parle peu et encore, sous le couvert de l’anonymat.  Selon Mélanchon, [c]ette omerta provient en partie de la réaction de Dominique Rigaux, virulente, cherchant et obtenant ce silence par l’intimidation. Intimider, c’est, dans ce petit milieu, faire jouer ses relations, professionnelles et personnelles, susceptibles d’intervenir dans les carrières des uns et des autres.

L’article fait largement état de ce système d’influence (une commission d’enquête aurait bien du pain sur la planche pour mettre à jour toutes les ficelles en jeu), ainsi que les commentaires des lecteurs.  Très, très instructif.

Dans la même journée, Nature publiait une dépêche sur le programme RePAIR (financé par les Instituts nationaux de la santé (National Institutes of Health ou NIH), dont il a déjà été question dans L’éveilleur ici.

L’article dans Nature est fort intéressant à plus d’un égard.  Il présente les cas d’inconduite qui ont mené les participants à s’inscrire à RePAIR :

rehab-raisons

Il présente également les raisons invoquées par les participants pour expliquer leur inconduite :

rehab-causes

Enfin, il déboulonne trois mythes concernant l’inconduite en recherche en prenant en considération l’expérience des participants au programme RePAIR :

  1. Only bad apples get in trouble.
  2. Scientific skills are enough to do good science.
  3. The more publications and grants the better.

Mais revenons aux scientifiques qui s’inscrivent à ce programme.  De l’avis des auteurs du récent article paru dans Nature,

[t]here are high-profile cases of serial fraudsters who have consciously built their careers on fabricated data and who, some research suggests, have personality disorders. We do not encounter such individuals in our programme. In general, we work with talented faculty members who seek to do good research and whom institutions wish to retain.

Ce qui semble insuffisant à Donald Kornfeld, de l’Université Columbia puisque

[i]f this program is limited to individuals who have either committed plagiarism or failed to follow various Regulations re animal welfare and informed consent, they are not working with the 88% of  individuals found guilty of research misconduct annually by ORI. Over the ten years I studied ORI Reports, only 12% of guilty offenders were guilty of plagiarism; 45% were guilty of fabrication and 66% of falsification.

Curieux de savoir ce que pensent ses lecteurs de la réhabilitation des fraudeurs scientifiques, Ivan Oransky, auteur du blogue Retraction Watch, a mis un sondage en ligne.  Voici ce que 646 personnes (en date du 10 juin 2016, 14h) ont répondu à la question Should researchers found guilty of misconduct be rehabilitated?

rehab-poll

 

Sources:

Mélenchon, Jean-Luc.  Plagiat : l’affaire Rigaux rebonditLe Monde.  8 juin 2016.

DuBois, James M., Chibnall, John T., Tait, Raymond et Wal, Jillon Wander.  Misconduct : Lessons from researcher rehab.  Nature.  8 juin 2016.

Oransky, Ivan.  Should researcher guilty of misconduct go to “rehab”?  Retraction Watch.  8 juin 2016.

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Sonia Morin

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