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Le pétrole sans les universités?

Alors que la Conférence sur les changements climatiques prend fin à Lima au Pérou, le Sustainability and Education Policy Network (SEPN) publie un résumé de recherche sur l’état du mouvement de retrait des investissements dans le secteur des énergies fossiles au sein des établissements d’enseignement supérieur.

 Quelques faits saillants du mouvement de désinvestissement des énergies fossiles :

  • Dans les universités et collèges canadiens, on compte 27 groupes actifs répartis en Ontario (10), en Colombie Britannique (8), en Nouvelle-Écosse (4), au Québec (2), au Nouveau-Brunswick (2) et à l’île du Prince Édouard (1) selon le SEPN. D’autres estiment plutôt que le mouvement touche une quarantaine d’universités canadiennes (Affaires universitaires).
  • À l’origine, ces groupes sont des initiatives étudiantes qui gagnent progressivement le support d’autres groupes et acteurs gravitant autour de l’établissement (association de diplômés, professeurs) ou de la communauté plus largement.
  • Concordia est la première université canadienne à acquiescer partiellement aux demandes de désinvestissement (novembre 2014). Mais le mouvement Divest Concordia en appelle à un désinvestissement total à l’instar de l’Université de Glasgow (Écosse), estimant que le désinvestissement annoncé de 5 millions est insuffisant compte tenu des investissements totaux de la Fondation de l’Université dans ce secteur (10 millions).
  • Aux États-Unis, 13 établissements d’enseignement supérieur ont accepté de désinvestir du pétrole.
  • Au Canada, les établissements d’enseignement supérieur sont encore timides sur ce terrain compte tenu de l’essor de l’industrie pétrolière ces dernières années.
  • Alors que plusieurs universités se positionnent comme engagées en matière de développement durable, le rapport du SEPN met en exergue la non-continuité de cet engagement en matière d’investissement.

Les principaux arguments du mouvement de désinvestissement

  • Les institutions se doivent d’investir de façon responsable dans des secteurs faisant la promotion d’un futur plus propre pour les générations d’étudiants actuelles et futures.
  • Les acteurs de ce mouvement demandent plus de transparence et souhaitent connaître quelles entreprises et secteurs industriels leur université encourage ou soutient.
  • La valeur du désinvestissement est davantage symbolique que monétaire. Les détracteurs du mouvement de désinvestissement sont d’avis que le secteur des énergies fossiles est trop gros et important pour être affecté significativement. Les compagnies gazières et pétrolières étant évaluées à 4,65 trillions, le mouvement de désinvestissement correspond à peine à 1% de cette valeur.
  • Le mouvement a comme objectif le désinvestissement, mais aussi de faire perdre le « permis social » qu’ont ses compagnies d’opérer.

Un mouvement appelé à croître?

Bien que le prix du brut soit à un niveau très bas ces jours-ci, on peut croire que ce mouvement résistera aux aléas des marchés. Le risque carbone est de plus en plus considéré par les investisseurs institutionnels comme en témoigne une enquête menée par Novethic.

Le Rockfeller Brothers Fund (860 millions $ en actifs), contrôlé par la famille Rockfeller qui a fait fortune dans l’industrie pétrolière, annonçait en septembre qu’il retirait ses investissements des énergies fossiles pour se tourner vers les énergies propres.

Mondialement, le mouvement représente 50 milliards qui ont été désinvestis du secteur des énergies fossiles par au moins 181 organisations : des gouvernements (48% du 50 milliards); des établissements d’enseignement (38%), des fondations (8%) et autres institutions de santé, ONG et individus (6%).

À propos des changements climatiques :

  • La combustion des énergies fossiles et les procédés industriels sont responsables de 78% de l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) entre 1970 et 2010 selon le 5e rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC).
  • Le GIEC en appelle à un désinvestissement des institutions des compagnies pétrolières, comme moyen supplémentaire de limiter le réchauffement global à 2oC au-dessus des niveaux préindustriels. Pour atteindre ce scénario, il faudra réduire entre 40 et 70% les émissions mondiales de GES au-dessous d’ici 2050 (par rapport à 2010) et les faire complètement disparaître pour 2100.

Sources:

The Sustainability and Education Policy Network. Research Brief: The State of Fossil Fuel Divestment in Canadian Post-secondary Institutions

GIEC. 2014. Changements climatiques 2014 : Rapport de synthèse.

Novethic. 2014. « Risque carbone : la lente prise de conscience des investisseurs institutionnels », publié le 5 décembre.

Peters, Diane. 2014. « Des militants demandent aux universités d’arrêter d’investir dans les combustibles fossiles ». Affaires universitaires, 6 août.

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Véronique Bisaillon

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